L’argent coulait à flots dans les caisses du grand argentier Broulis. Lequel se disait qu’il était né sous la plus belle des étoiles, celle qui ne s’éteint jamais. Mais la vie est ainsi faite, les bonnes et mauvaises surprises balancent au rythme des cycles. Coup sur coup, des retournements de situation affectant les finances de la métropole Lausanne viennent ébranler les certitudes du canton.
Il y a d’abord l’affaire des bonus accordés en douce à deux administrateurs de la société d’incinération lausannoise Tridel. Alors qu’elles auraient dû rester à Lausanne, des sommes rondelettes sont parties entretenir notamment le festival du film des Diablerets, événement « culturel phare » dont le président n’est autre qu’un ancien municipal lausannois et administrateur de Tridel, le conseiller aux Etats vaudois Olivier Français. Un audit sera sans doute réclamé par ses anciens collègues du gouvernement de la cité lémanique.
Une enquête est en cours également au conservatoire de Lausanne dont la gouvernance est contestée. Le directeur général Hervé Klopfenstein affronte des critiques. Les pouvoirs publics qui financent cette institution à l’architecture remarquable et située au coeur de la ville sont dans l’expectative. Les résultats de l’audit devraient être connus dans le courant du mois de janvier.
Les mauvaises nouvelles n’arrivant pas seules, l’excellent ensemble musical Sinfonietta semble avoir de la difficulté à se remettre du départ de son fondateur, le charismatique chef d’orchestre Jean-Marc Grob. Son successeur a fait long feu, un remplaçant a certes été trouvé mais l’avenir de la formation réputée pour son approche spontanée et didactique de la musique n’est plus assuré. Selon la presse locale, la ville de Lausanne songerait à lui retirer son soutien.
Les soucis des édiles ne s’arrêtent pas là. Une société de première importance basée à Lausanne, le groupe Alpiq, leader de l’énergie helvétique, est sur la sellette en Roumanie. L’autorité fiscale réclame 200 millions de francs de TVA à l’une de ses filiales. Indirectement actionnaire d’Alpiq, la ville de Lausanne se demande où l’entraînera une entreprise qui navigue dans les chiffres rouges, alors que ses propres comptes bouclent déjà par des déficits. Cette situation ne réjouit pas non plus le canton qui voit sa propre dette remonter depuis deux ans.
Plombée par les mésaventures de son chef-lieu, l’entité au fanion blanc et vert se découvre soudain vulnérable. Le contribuable est en droit de se sentir inquiet. A ses élus plébiscités au printemps dernier, avant que le vent ne se lève, de montrer de quel bois ils se chauffent! Tant il est vrai que la grandeur d’un homme ou d’une femme d’Etat se mesure surtout à sa capacité de mener la barque dans la houle.