Le ministre Berset précise dans une interview que seront d’abord concernées les personnes « à risque ». Est-ce à dire que le vaccin sera rendu obligatoire dans les couches âgées de la population? Et que se passera-t-il en cas de résistance? Les assurances refuseront-elles de payer la prise en charge médicale et hospitalière des récalcitrants? La constitution octroie à tout citoyen « la liberté personnelle, notamment le droit à l’intégrité physique et psychique ».
Et d’abord, le vaccin sera-t-il vraiment efficace, comme le souhaite Berne? Une chose est sûre, le choix de l’administration fédérale rend un service très lucratif à l’entreprise Lonza qui produira en partie le vaccin à Viège. Il a déjà un effet immédiat, celui de propulser vers les étoiles le cours de l’action Lonza, vedette de l’indice phare de la bourse helvétique.
Toutes ces questions, le quidam aimerait les trouver aussi dans les médias du courant dit dominant. Mais force est de constater que ces mêmes titres manifestent très peu de curiosité. Manque de moyens ou défaillance intellectuelle?
En crise dans son modèle économique, la presse helvétique (notre éditorial du 1er août) réclame le soutien public mais son problème le plus grave n’est même pas là. Il se situe dans la défiance que l’information médiatique inspire au lectorat, une tendance qui rejoint celle prévalant aux Etats-Unis, région pionnière de la liberté de la presse, même si le contexte n’y est évidemment pas tout à fait comparable. A peine 40% de la population américaine croit encore en la fiabilité des médias, révèle une enquête récente de l’institut de sondage Gallup. Cette part était de 75% au moment de l’affaire du Watergate, dans les années 70. Le coronavirus n’a fait que détériorer l’image de la presse. Accusées de partialité, selon qu’elles appuient ou non Trump, les chaînes de télévision en prennent pour leur grade.
La presse doit-elle, peut-elle, pour autant être « neutre »? Dans ces colonnes, nous nous sommes engagés à plusieurs reprises en faveur des journaux d’opinion, les jugeant d’une certaine manière plus honnêtes que ceux prétendant à une impartialité qui n’existera jamais. Condition sine qua non, ces mêmes titres se doivent d’afficher la couleur. Préciser leur orientation, voire affiliation politique, religieuse ou autre. Dans un deuxième temps, ils leur incombe de remplir leur mission attribuée par la Déclaration des devoirs et des droits du journaliste, à savoir la « recherche de la vérité, en raison du droit qu’a le public de la connaître et quelles qu’en puissent être les conséquences pour lui-même ».
Dans l’affaire du vaccin contre le coronavirus, les médias ont une occasion en or d’affirmer leur professionnalisme. Sauront-ils la saisir?