Il n’est pas étonnant qu’elles taillent des croupières à leurs rivales européennes, en particulier au départ de Genève. Mortes de jalousie, ces dernières répliquent maladroitement en accusant Emirates, Etihad et Qatar Airways de concurrence déloyale parce qu’elles appartiennent en très grande partie à l’Etat et paient beaucoup moins d’impôts.
Piquée au vif, Air France-KLM demande le soutien de Paris. Swiss ne va pas aussi loin mais la semaine dernière, le transporteur helvétique s’est tout de même adressé à Berne pour lui demander d’intervenir. Comment? Mystère et boule de gomme. Les autorités de l’aviation sont empruntées pour revenir sur le modèle de la déréglementation qu’elles appliquent les yeux fermés depuis deux décennies. En 2001, elles n’y ont même pas dérogé lors du crash de Swissair. Or c’est dans ce malentendu systémique que blesse le bât.
D’un côté la privatisation du ciel a abouti à une hécatombe de compagnies, victimes de la concentration. De l’autre, elle n’empêche pas les gros acteurs de n’en faire qu’à leur tête.
Les dés sont pipés par exemple aux Etats-Unis où le monde aérien s’est entièrement recomposé au terme d’une intense partie de fusions et acquisitions.
Mais si les compagnies frappées du drapeau étoilé cavalent actuellement en tête du classement de la sécurité, c’est aussi parce que Washington fut prompt à leur donner un coup de main en 2001 et 2003, lorsque l’intérêt national l’exigeait.
Les enseignes du Vieux Continent aimeraient bien bénéficier des mêmes largesses. Mais face aux compagnies du Golfe, qui roulent main dans la main avec leurs émirs, leurs atouts sont réduits.