La nécessité de remplacer Didier Burkhalter au Conseil fédéral a propulsé sur le devant de la scène ce personnage qui se profile comme le candidat de la Suisse italienne, une minorité absente du gouvernement depuis près de vingt ans.
Politiciens romands s’abstenir! A lire la presse alémanique, les carottes sont cuites, le parlement n’élira ni Moret ni Maudet. On peut même se demander si la première ne sera pas le faire-valoir d’Ignazio Cassis. Moret sur le ticket libéral, l’alibi magnifique qui aiderait Cassis à intégrer le Club des sept. Grâce à la candidate libérale-radicale romande, une lobbyiste de première classe, il ne serait plus le seul sous-marin d’un groupe d’intérêt.
Mais surtout la raison fédéraliste prime devant toute autre considération. Isabelle Moret a un grand défaut, elle provient d’un canton qui est déjà représenté au gouvernement. Que diraient les Tessinois si d’aventure une deuxième personnalité vaudoise piquait son fauteuil à leur poulain? L’impensable affront se traduirait par des règlements de comptes interminables lors des prochaines grandes échéances parlementaires.
Les médias romands tartinent sur les chances de Maudet et Moret. C’est de bonne guerre. Mais ce réflexe de clocher ne changera pas l’opinion majoritaire dans les chaumières de Suisse allemande. Les dés sont jetés. Mieux vaudrait se demander si le cirque qui entoure la campagne électorale correspond vraiment à l’esprit des institutions helvétiques. En 1979 quand Léon Schlumpf a été élu au Conseil fédéral, nul n’avait jamais entendu son nom au-delà de Coire. Et pourtant la Suisse n’a pas trop pâti de son séjour au gouvernement.
Aujourd’hui on met en scène les candidats comme des gladiateurs antiques. On jauge leurs forces et leurs faiblesses supposées mais au final on ne sait rien ou presque d’eux. Même leur programme figure dans les limbes. Parce que la gouvernance dans ce pays est affaire de consensus. Pas une affaire Fillon ne viendra perturber les débats, renverser les pronostics, amener un Macron au pouvoir. Les communicateurs gesticulent beaucoup mais au bout du compte aucune mousse au goût âpre de houblon ne viendra déborder de la chope politique. La prochaine élection au Conseil fédéral accouchera d’un sirop cassis.