L’appétit vient en mangeant. Non content de combattre l’initiative 1:12 pour la limitation des salaires, SuccèSuisse, mouvement de la droite économique né il y a quelques mois, compte faire campagne contre six objets proposés en votation par la gauche et l’UDC d’ici 2015. Au nom du libéralisme et du «modèle suisse».
Qu’est-ce que le modèle suisse? Et d’abord pourquoi ne pas laisser les coudées franches à economiesuisse? Après avoir connu une succession de contradictions, cette organisation faîtière n’est certes plus que l’ombre de son puissant ancêtre, le Vorort. On l’a accusée d’avoir mal géré la campagne contre l’initiative sur les rémunérations abusives et de trop faire le beurre de la finance à l’heure de la pression fiscale. Le doute s’est insinué au point qu’elle n’a toujours pas trouvé la perle susceptible de reprendre sa direction suite au départ, en juin 2013, de Pascal Gentinetta, un fervent partisan du secret bancaire.
Pouls de 100’000 entreprises employant plus de 2 millions de salariés, economiesuisse exerce pourtant un rôle bien défini, qui ne saurait être confié au premier venu. SuccèSuisse jure ses grands dieux qu’elle ne veut pas la concurrencer.
On la croirait sur parole, n’était le pedigree de ses promoteurs. Passons encore sur le Romand de service, un parlementaire qui mange à tous les râteliers. Mais son principal animateur, le Zurichois Ruedi Noser, ne laisse planer aucun doute sur ses ambitions: il a été le meilleur défenseur au parlement de l’accord Fatca signé avec Washington pour coincer les clients américains des banques suisses.
Le soupçon s’amplifie quand on voit apparaître le nom de Martin Naville. Que fait le directeur de la Chambre de commerce américano-suisse dans l’organigramme de SuccèSuisse? A l’heure du scandale des grandes oreilles du Pentagone, on aurait préféré une présence, disons, plus neutre.