La belle formule que voilà! Les grands fossoyeurs d’emplois de l’histoire n’y avaient pas pensé pour faire passer la pilule. Les actionnaires de Swissair, par exemple, auraient pu s’en inspirer après le «grounding» de l’année 2000, lorsque plus de 2500 collaborateurs perdirent sur travail. Déclarer qu’on y «renonçait» aurait été tellement plus élégant que de parler de licenciements!
Au moins ces décideurs n’eurent-ils pas ce cynisme. Car dans le verbe renoncer il y a l’idée de sacrifice. Au carmel, les religieuses renoncent au monde. Il en est de même pour les moines qui renoncent au costume-cravate en adoptant la bure. Moins spontanément et avec une infinie tristesse, telle politicienne vaudoise cède aux pressions de la base de son parti et «renonce» à une demande de dérogation à la limitation de son mandat.
Pour revenir aux CFF, l’auteur du titre de journal angélique énoncé plus haut verrait-il le transporteur sur rails comme un adepte du dépouillement au service de la communauté? Ce serait cocasse quand on considère que son PDG est l’un des fonctionnaires les mieux payés du pays! Ce dernier consentirait-il pour autant à réduire son salaire? Dans le même état d’esprit, notre chère régie serait-elle disposée à «renoncer» à l’augmentation prévue du tarif des abonnements, à la fin de l’année?
En «renonçant» à 1400 postes, les CFF n’ont certainement pas agi par altruisme. Le PDG ne gagnera pas moins. Et le prix de l’abonnement continuera de grimper. Pourrait-il en être autrement dans un système mû par la glorification de l’intérêt personnel au détriment de la collectivité? Je renonce à le croire.