Sinon comment qualifier l’incroyable feuilleton sans rebondissements qui alimente la Une des médias depuis l’élection de Donald Trump? Un véritable matraquage à sens unique, destiné à prouver que le président des Etats-Unis n’a pas le mental nécessaire pour assumer sa fonction. Quelle autre nation de taille comparable se permettrait un tel déballage aux dépens du numéro un de l’Etat?
La planète entière s’est délectée des derniers missiles du “New York Times”, les confidences d’une personne appartenant à l’entourage professionnel de M. Trump. Selon cette gorge profonde, l’homme à la houpette dorée est sous la surveillance constante de ses collaborateurs. Surtout ne pas lui montrer le bouton rouge, celui que l’on active en dernier ressort, quand la dissuasion a failli. Allez savoir, cela pourrait lui démanger… Le prochain épisode est déjà connu, il rebondira sur le dernier film de Michael Moore, que l’on annonce sanglant pour le locataire de la Maison Blanche.
Trump hait les journalistes, assurent ses détracteurs. On n’a pas trop de peine à les croire. Par contre il faudrait nous expliquer pourquoi les journaux américains ne semblent pas pâtir de cette défiance. Tandis qu’en France, la presse supporte très mal son divorce d’avec Macron (“Le Temps” du 12 septembre 2018), aux Etats-Unis, au contraire, les médias cartonnent avec Trump. Leur liberté dans le ton et le contenu est totale. Quel exemple pour les pays dont les médias sont sous constante surveillance! En Chine, l’envoyé de la RTS qui réalise un reportage sur la communauté turcophone ne peut pas travailler dans des conditions normales. Peaux de banane et tracasseries administratives constituent son quotidien.
Et que dire de la mésaventure vécue par le chroniqueur du « Temps », spécialiste éminent de l’Empire du Milieu? Frédéric Koller voulait couvrir la visite en Chine du ministre de l’Economie Schneider-Ammann mais Pékin lui a refusé le visa. On aurait souhaité que les journalistes suisses agréés renoncent au voyage en signe de solidarité. On peut toujours rêver.
Si Trump devait connaître la destitution, les médias américains pourront crier cocorico. Reporteront-ils leur soif de scalps sur le vice-président Pence, un intégriste religieux à côté duquel M. Trump a l’allure d’un doux rêveur? En prévision des élections de novembre, se pencheront-ils enfin sur le programme des démocrates, singulièrement en panne d’idées quant aux options socio-philosophiques d’une civilisation entraînée dans une fuite en avant militaro-industrielle à l’heure où les changements climatiques interrogent sur le sens du progrès technologique?
Le quatrième pouvoir n’a jamais été aussi contesté. Sa chance de réhabilitation n’a jamais été aussi grande non plus.