Les commentateurs vont à la pêche des citations du successeur de José Manuel Barroso pour tenter de décrypter sa pensée profonde.
En 2007, celui qui était alors le premier ministre du Luxembourg tendait une perche à Micheline Calmy-Rey dans le dossier fiscal. La Suisse n’est pas l’Irak des Alpes, déclarait-il. Mais en 2011, il saisissait sa casquette de président d’Eurogroupe, l’instance qui rassemble les grands argentiers de la zone euro, pour cette fois stigmatiser l’isolement de la Suisse, cette «tache blanche sur la carte de l’Europe». Ce qui lui valut l’ire de Christoph Blocher qui le traita de nouveau Hitler.
Jean-Claude Juncker, ajoutent ses admirateurs, connaît parfaitement la Suisse pour y séjourner souvent pendant ses vacances. Mais cette qualité ne suffit pas à le rendre nettement plus helvétophile que José Manuel Barroso, un ami de la Suisse, lui aussi, en tout cas quelqu’un qui se définissait comme tel. Poulain du politologue Dusan Sidjanski, le Portugais a fait ses études à Genève.
En réalité, la comparaison entre l’ancien et le nouveau est vaine car l’enjeu ne mérite pas le développement d’une angoisse métaphysique comme celle que nourrit à l’égard de Juncker le premier ministre britannique. En effet, le président de la Commission européenne n’est pas Churchill ni de Gaulle. A lui seul, il n’est pas en mesure de changer le destin du continent. Ce qu’on lui demande, c’est de gérer les grandes options européennes qui restent fondamentalement économiques. Et atlantiques. On peut compter sur Juncker, un habitué des réunions du réseau d’influence pro-américain Bilderberg, pour poursuivre sur la ligne tracée par Washington au lendemain de la guerre, quand il s’agissait de reconstruire l’Europe.