Rappelons que ces déchets encombrants avaient fait le tour de l’Europe, renvoyés comme une patate chaude partout où leur expéditeur, le groupe Hoffmann-La Roche, avait voulu les entreposer, les soustrayant à la curiosité du public.
A la suite d’une enquête menée par son enquêteur fétiche, Alex Décotte, la reine de l’émission «A bon entendeur» avait dû comparaître devant les tribunaux. L’auteur de la plainte, le chimiste cantonal vaudois, s’en était pris également au scientifique Jacques Neyrinck qui exhibait, l’espace de quelques secondes, une petite fiole contenant la dangereuse dioxine, source de la grave pollution qui avait dévasté plusieurs communes du nord de l’Italie après l’explosion du réacteur de l’usine chimique Icmesa ayant appartenu au groupe Givaudan-Hoffmann-La Roche.
L’équipe d’ABE avait gagné le procès haut la main mais la presse s’était montrée étonnamment discrète. La nouvelle n’avait pas fait la une des journaux. Réservés, les médias le sont à peine moins aujourd’hui. Près de 29 ans après cet événement ubuesque, ils ne font pas de zèle pour relater certains faits dont ils ont eu connaissance. Présent aux obsèques de Catherine Wahli, vendredi 30 décembre 2011, Jacques Neyrinck a raconté à la «Méduse» comment il avait dû subir la mauvaise humeur de son employeur, l’Ecole polytechnique fédérale (EPFL). Le recteur de l’époque craignait de perdre l’un des principaux sponsors de la haute école. De fait, Hoffmann-La Roche lui retirera son obole: 10 millions de francs.
«J’étais à deux doigts de perdre mon emploi de professeur», se souvient Jacques Neyrinck, sourire en coin. L’intéressé qui, par la suite, a fait carrière dans la politique – il est aujourd’hui le doyen du Conseil national – , en frémit quand même rétrospectivement.