Mais, à 35 ans, le président à vie nord-coréen n’est plus le benjamin de la caste des dirigeants, un privilège qu’il partageait quasiment à égalité avec l’émir du Qatar et le roi du Bouthan. Loin devant le Français Emmanuel Macron, intronisé à 39 ans en 2017. Voilà que ce diable de Sebastian Kurz bouleverse la hiérarchie. Le nouveau Premier autrichien, 31 ans, met tout le monde d’accord.
Verra-t-on prochainement un chef de gouvernement âgé de 25, voire 20 ans? Il est vrai qu’Alexandre de Macédoine n’a pas attendu ses 30 piges pour devenir Grand. Mais il s’agissait d’une autre époque. On mourrait jeune, il fallait se dépêcher si l’on voulait faire «carrière». MM. Macron, Kurz et autres Justin Trudeau ont toute la vie devant eux. Et surtout le temps de voir défiler beaucoup de jeunes pousses, susceptibles de leur prendre la place. Sic transit …
Elles sont révolues les époques où les sociétés respectaient certains codes ancestraux, les cheveux blancs, associés à la sagesse. Aujourd’hui c’est le jeunisme qui a le vent en poupe. Mais garantit-il pour autant une bonne gouvernance? Ou ne traduit-il pas plutôt une forme d’impuissance? Traçons le parallèle avec les associations. Dans ces structures il est tentant, en période de crise, de se tourner vers le petit dernier, quand on a épuisé toutes les solutions. Avec cette idée qu’un jeune réseauteur maîtrise mieux les nouveaux enjeux technologiques. Et fait table-rase de certains tabous idéologiques. Quand la déception n’arrive pas avec les premières cicatrices de botox. En France, par exemple, Macron a déjà douché beaucoup d’espoirs en se brouillant avec le vieux soldat qui dirigeait son armée.
Macron irrite également son monde par son autoritarisme anti-médiatique, tandis qu’au Canada, la liberté de la presse a reculé depuis l’accession au pouvoir de Justin Trudeau. En Autriche, on se demande comment se comportera M. Kurz. Imitera-t-il son voisin Viktor Orban, ex-jeunet de la politique internationale, dont on dit qu’il admire la poigne et son dédain des médias?
Tombés dès l’âge tendre dans la marmite du numérique, les juniors de la politique ressemblent à des aliens. Savent-ils tout simplement encore ouvrir un journal? Beaucoup de citoyens pourraient comprendre cette ignorance de leurs élus, comme le fait que ceux-ci ne supportent plus la moindre contradiction venue du quatrième pouvoir. Tolèreraient-ils pour autant d’autres dérives autoritaires? Telle est la question car les troisième et deuxième pouvoirs ne sont aucunement des citadelles indestructibles. Or la démocratie sans justice ni législatif est difficile à imaginer.